Pourquoi l’intestin est-il appelé le « deuxième cerveau » en santé ?

Sophie Lambert

Le rôle du second cerveau : l’intestin et ses complexités

L’intestin est souvent désigné comme un « deuxième cerveau », un surnom attribué à cet organe par le professeur Michael Gershon, enseignant à l’Université de Columbia à New York. Mais qu’est-ce qui justifie cette appellation ? La réponse réside dans la manière dont cet organe possède ses propres mécanismes de régulation nerveuse, distincts du système nerveux central. Contrairement à d’autres organes, l’intestin est doté d’un réseau neuronal autonome, connu sous le nom de système nerveux entérique. Ce réseau s’étend tout au long du tube digestif, de l’œsophage au rectum, et comporte plusieurs centaines de millions de neurones. Ces neurones forment une véritable mini-structure nerveuse qui contrôle localement de nombreuses fonctions digestives.

Ce qui rend cette organisation encore plus fascinante, c’est que le système nerveux entérique dérive du même tube neural que le cerveau, durant les premières semaines de la vie embryonnaire. La similitude entre ces neurones intestinaux et ceux présents dans le cerveau est frappante, puisqu’ils possèdent une structure très comparable. La présence d’un tel système nerveux dédié à la gestion de l’intestin explique pourquoi cet organe a été qualifié de « deuxième cerveau » : il possède des capacités et une autonomie de contrôle remarquables.

Une fonction essentielle dans la gestion de la digestion

Mais quelle est la véritable utilité de doter l’intestin de cette autonomie nerveuse ? La réponse pourrait résider dans l’importance capitale de la digestion. En effet, cette fonction est vitale puisqu’elle permet à l’organisme d’accéder à l’énergie nécessaire à son bon fonctionnement. Pour s’assurer que cette tâche complexe soit accomplie de façon fiable, le corps a développé cette structure nerveuse spécialisée au sein de l’intestin.

Plus précisément, le système nerveux entérique orchestre plusieurs opérations indispensables à la digestion. Il modère la motilité intestinale, c’est-à-dire les contractions qui permettent de faire avancer les aliments tout au long du tube digestif. Il régule également la sécrétion d’enzymes, d’hormones et de mucus, substances essentielles pour décomposer les aliments et pour protéger la muqueuse intestinale. De plus, il possède la capacité de détecter des substances nocives présentes dans notre nourriture, et il déclenche des réponses de défense pour préserver la santé de l’ensemble du système digestif.

Toutes ces activités peuvent être menées de manière indépendante, sans que le cerveau n’intervienne directement à chaque étape. Cela explique pourquoi l’intestin a mérité ce nom de « deuxième cerveau », étant donné sa capacité à fonctionner de façon autonome dans la régulation de ses missions.

Une liaison permanente avec le cerveau

Il ne faut cependant pas croire que cet organe fonctionne isolément. Au contraire, il entretient une communication constante avec le système nerveux central, principalement via le nerf vague. Ce dialogue bilatéral permet à l’intestin de recevoir des informations du cerveau, comme des signaux liés au stress ou aux émotions intenses, qui peuvent influencer son fonctionnement. Par exemple, le stress ou une grande nervosité peuvent provoquer une sensation de « nœud dans le ventre » ou entraîner des troubles tels que la diarrhée.

De façon inverse, il est également envisageable que des anomalies neurologiques trouvent leur origine dans l’intestin. Plusieurs études récentes suggèrent que des pathologies comme la maladie de Parkinson pourraient débuter dans l’intestin avant de s’étendre au cerveau. Cette hypothèse remet en question la vision traditionnelle, en indiquant que l’intestin et ses micro-organismes pourraient jouer un rôle préalable dans certaines maladies neurodégénératives.

Enfin, cette relation étroite entre cerveau, intestin et microbiote intestinal ouvre un domaine de recherche très prometteur. La compréhension de ces interactions complexes pourrait ouvrir de nouvelles voies pour traiter divers troubles intestinaux ou neurologiques à l’avenir.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.