Pourquoi la popularité des races comme le malinois et le berger australien peut poser problème

Sophie Lambert

L’Engouement pour les Chiens en France : Tendances, Risques et Réflexions

Chaque année, la France voit un grand nombre de ses citoyens accueillir un chien dans leur famille. Il est estimé qu’environ un tiers des ménages français possède un compagnon à quatre pattes. En 2024, selon la Centrale canine, plus de 205 000 portées de chiens de races différentes ont été enregistrées, représentant environ 192 espèces distinctes. Parmi ces nombreuses races, une figure s’est imposée en 2023 comme la plus en vogue : le berger australien. D’après l’I-CAD, le registre national d’identification des chiens, chats et furets, ce chien a été identifié en 2024 dans plus de 34 000 cas. Il trouve peu à peu sa place devant des races telles que le chihuahua, avec plus de 32 000 identifications, ou encore le border collie, le golden retriever et le labrador, qui complètent le top des préférences. On remarque également que ces choix sont souvent influencés par une tendance passagère, amplifiée par la présence sur les réseaux sociaux, par des célébrités ou par la culture populaire. Des races comme le shiba, le spitz ou encore le corgi séduisent également, et il existe même des rassemblements dédiés à certaines races, comme les marchettes de teckels, surnommées « sausages walks » en référence à leur silhouette allongée.

Ce phénomène soulève toutefois des questions quant à l’émergence de modes qui peuvent, malheureusement, mettre en péril le bien-être de l’animal. En effet, la popularité soudaine de certaines races ne s’accompagne pas toujours d’une compréhension approfondie de leurs besoins spécifiques. Le choix d’un chien ne doit pas se limiter à une simple envie esthétique ou tendance passagère : il doit être mûrement réfléchi, en tenant compte des exigences liées à la race, au mode de vie de son propriétaire et à la capacité à répondre à ses besoins. Le berger australien, par exemple, est une race qui fascine par ses beaux yeux clairs et son pelage soyeux, mais cet animal est également très énergiques et demande une activité physique quotidienne soutenue, ainsi qu’une éducation stricte. Lorsqu’un tel animal est adopté sans conscience de ses nécessités, cela peut conduire à des abandons massifs. Les refuges et associations sont souvent débordés par le nombre d’animaux à adopter, illustrant bien l’écart entre la mode et la réalité.

Par ailleurs, cette tendance à adopter certaines races est souvent alimentée par des motivations superficielles. Certains chiens, tels que le malinois ou l’american staffordshire terrier, connaissent une popularité croissante, principalement pour leur aspect physique ou leur réputation de chiens de sécurité, notamment grâce à leur utilisation par la police. Jacques-Charles Fombonne, président bénévole de la Société protectrice des animaux, explique que ces animaux sont aussi très prisés pour leur rôle de chien de garde ou de défense. Cependant, cette popularité suscite des problématiques préoccupantes. Ces mêmes races deviennent des cibles de trafics illégaux et de repro dupliquées sans contrôle rigoureux. Dans certains cas, des chiens sont même dressés pour réagir de manière agressive ou nerveuse afin d’être exploités dans des activités de combat, ce qui représente une véritable catastrophe pour leur santé mentale et physique. Ces chiens, tels que les malinois, bien qu’affectueux et réactifs, exigent une attention constante et une éducation adaptée. Lorsqu’ils sont abandonnés ou laissés seuls toute la journée, ils peuvent devenir bruyants ou destructeurs, ce qui pousse certains propriétaires à les rejeter, aggravant ainsi la problématique de l’abandon. La rééducation de ces animaux demande souvent beaucoup d’efforts, notamment pour leur redonner confiance en l’homme.

Les effets de mode ne s’arrêtent pas à la popularisation : ils entraînent également une multiplication d’élevages peu scrupuleux. Pour satisfaire la demande croissante, certains éleveurs peu responsables multiplient des portées sans respecter les normes sanitaires ou génétiques adéquates. Cette pratique contribue à faire proliférer des animaux malades ou porteurs de maladies génétiques, tout en aggravant la surpopulation dans les refuges. La sélection à outrance, notamment pour obtenir des caractéristiques esthétiques extrêmes, peut avoir des conséquences graves pour la santé des chiens. Les races brachycéphales, comme le bouledogue français, le bouledogue anglais, le boxer, le carlin ou encore le cavalier king-charles, ont été le fruit de croisements prédominants visant à obtenir une tête écrasée. Malheureusement, cette mode a entraîné de graves problèmes de santé. Ces races souffrent souvent de pathologies neurologiques dues à la compression du cerveau, de troubles respiratoires graves liés à l’aplatissement de leur nez, et les femelles doivent parfois recourir à des césariennes pour mettre bas, ce qui représente une véritable détresse pour leur santé. Malgré ces problèmes, ces chiens figurent parmi les plus populaires. L’I-CAD dénombre notamment que le bouledogue français se place à la sixième position des races les plus identifiées.

Ce phénomène de fascination pour certaines races révèle aussi la manière dont certains individus perçoivent l’animal de compagnie, par une optique consumériste. Avant de faire un choix définitif, il est essentiel de s’informer sur les besoins réels de la race, d’évaluer sa propre capacité à leur répondre, et de vérifier la réputation de l’élevage. L’adoption dans un refuge est une alternative valable et souvent méconnue, qui permet de donner une seconde chance à un animal en attente d’une famille aimante.

Enfin, l’importance de l’identification de son animal ne doit pas être sous-estimée. En 2024, plus de 923 000 chats et 713 000 chiens ont été enregistrés dans la base de l’I-CAD. Cette démarche est obligatoire et constitue le seul moyen officiel permettant de retrouver facilement le propriétaire en cas de perte. L’identification se fait traditionnellement par tatouage ou par puce électronique. Bien que neuf chiens sur dix soient aujourd’hui identifiés, moins de 10 % des chats disposent d’un tel dispositif. La réglementation impose que l’identification des chiens soit effectuée avant l’âge de 4 mois, et celle des chats avant leurs 7 mois, par un vétérinaire. Jacques-Charles Fombonne insiste sur le fait que c’est la seule méthode efficace pour pouvoir retrouver un animal perdu. La semaine nationale de l’identification des chiens et des chats, organisée chaque année, vise à sensibiliser le public à cette nécessité essentielle et obligatoire pour protéger nos compagnons à quatre pattes.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.