Une étape majeure dans la lutte contre le VIH : une nouvelle option thérapeutique recommandée en Europe
Une avancée significative vient d’être portée dans la lutte contre le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Le vendredi 25 juillet, l’Agence européenne du médicament (EMA) a émis une recommandation favorable à l’approbation d’un nouveau traitement destiné à l’Union européenne. Ce traitement, nommé lénacapavir et commercialisé sous la marque Yeytuo par la société Gilead Sciences, a déjà obtenu l’autorisation d’utilisation aux États-Unis dès juin dernier. Son but principal est de prévenir l’infection par le VIH chez les personnes à haut risque, grâce à une prophylaxie pré-exposition (PrEP).
Ce nouvel agent est présenté comme une innovation dans la prévention du VIH, car, contrairement aux stratégies actuelles, il permet une administration peu fréquente. Son usage recommandé en PrEP vise à diminuer la probabilité d’infection chez celles et ceux exposés régulièrement au risque. La mise sur le marché de Yeytuo en Europe offrirait donc une nouvelle arme dans la prévention, surtout pour des populations qui ont aujourd’hui un accès limité ou compliquée aux mesures classiques.
Pourquoi proposer Yeytuo quand la PrEP existante est déjà en place ?
Le traitement Yeytuo se distingue par un protocole simplifié : pour débuter, il faut injecter deux comprimés pendant deux jours consécutifs, puis le traitement consiste en deux injections sous-cutanée chaque année. Cette modalité facilite l’observance par les patients, notamment pour ceux qui peinent à suivre un traitement quotidien ou qui ont des difficultés à respecter un schéma thérapeutique rigoureux.
Selon l’EMA, la liberté de bénéficier d’injections moins fréquentes pourrait réduire le problème d’adhérence souvent observé avec les médicaments quotidiens. Elle souligne également que plusieurs personnes à haut risque dans l’Union européenne ou ailleurs n’ont pas accès aux options de PrEP actuellement disponibles, ce qui met en lumière l’urgence de développer de nouvelles alternatives. La mise au point de traitements innovants comme Yeytuo vise donc à pallier ces obstacles et à offrir une protection plus accessible et pratique.
Le mode d’action du lénacapavir
Le principe actif du Yeytuo, le lénacapavir, fonctionne en ciblant spécifiquement la capside du VIH. En se liant aux protéines qui entourent le matériel génétique du virus, le médicament empêche celui-ci de poursuivre son cycle de vie dans le corps. Après s’être ancré sur cette structure, le lénacapavir perturbe plusieurs étapes de la réplication virale, ce qui l’empêche de se multiplier efficacement. Par cette action, il contribue à empêcher l’infection ou la progression du virus chez les personnes exposées.
Ce médicament bénéficie d’une procédure d’évaluation accélérée par l’EMA, en raison de son importance pour la santé publique, tant en Europe qu’à l’échelle mondiale. Il a aussi été analysé dans le cadre du programme « Médicaments pour tous » (EU-M4all), un dispositif visant à garantir un accès plus large aux innovations thérapeutiques dans les pays où les capacités réglementaires sont parfois limitées. Les gouvernements ou autorités nationales peuvent s’appuyer sur cette évaluation pour prendre des décisions concernant l’intégration du médicament dans leurs programmes de prévention ou de traitement.
Une avancée considérée comme « une arme de prévention puissante »
Au-delà de ses propriétés préventives, le lénacapavir a été récemment salué par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Mi-juillet, cette organisation a recommandé l’utilisation du traitement injectable, connu sous l’abréviation LEN. Selon l’OMS, ce médicament à injection biannuelle représente une étape décisive pour renforcer la protection des populations à risque : il est particulièrement adapté à celles et ceux qui ont des difficultés à suivre un traitement quotidien, qui subissent le stigma associé à leur statut ou qui rencontrent des obstacles dans l’accès aux soins. La simplicité du traitement, avec seulement deux injections par an, constitue une avancée notable dans cette quête de prévention efficace.
Dans un communiqué publié le 14 juillet, l’OMS a mis en avant le potentiel du LEN. Elle y souligne que, bien qu’un vaccin contre le VIH reste une solution encore incertaine, le lénacapavir se rapproche de cette ambition en étant un antirétroviral à long terme. Les essais cliniques ont démontré qu’il permettait d’éviter presque toutes les infections de VIH chez des populations à risque, ce qui en fait une option très prometteuse.
Le directeur général de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, a affirmé que cette nouvelle classe de médicaments pouvait changer la donne. La publication des nouvelles directives de l’organisation, associée à l’approbation récente par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis, marque une étape cruciale pour rendre cet outil accessible à un plus grand nombre. L’OMS indique également son engagement à collaborer avec les États et les partenaires internationaux pour accélérer la disponibilité du traitement, afin qu’il profite aux communautés les plus vulnérables dans les meilleurs délais.
Une crise persistante : 1,3 million de nouvelles infections en 2024
Selon les estimations de l’OMS, l’année 2024 devrait voir environ 1,3 million de nouvelles personnes contaminées par le VIH dans le monde. La répartition géographique montre que l’Afrique reste la région la plus durement touchée, avec environ 650 000 nouveaux cas, tandis que l’Europe doit compter environ 160 000 cas. Ces chiffres illustrent le maintien d’un niveau élevé de nouvelles infections, notamment dans les populations à risque telles que les travailleurs du sexe, les hommes ayant des rapports avec des hommes, les personnes transgenres, ainsi que celles qui consomment des drogues injectables ou qui sont incarcérées.
Winnie Byanyima, la directrice générale d’Onusida, insiste sur le fait que des outils comme le lénacapavir pourraient devenir décisifs pour lutter efficacement contre cette recrudescence. Cependant, son impact dépendra du prix auquel le médicament sera proposé et de sa disponibilité pour tous ceux qui pourraient en bénéficier. La question de l’accessibilité demeure centrale pour transformer cette avancée thérapeutique en une véritable solution de santé publique.
En Europe, pour que Yeytuo devienne une option accessible, il reste à obtenir l’approbation formelle de la Commission européenne, puis celle de la Haute autorité de Santé en France. La mise en œuvre de cette nouvelle solution dépend donc de processus réglementaires encore en cours, mais son potentiel pour faire évoluer la prévention du VIH est désormais reconnu comme considérable.