Les risques des anti-inflammatoires non stéroïdiens pendant la grossesse

Sophie Lambert

Les dangers liés à la consommation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens durant la grossesse : un enjeu de santé publique

Depuis plusieurs années, les autorités sanitaires mettent en garde contre les risques encourus par les femmes enceintes lorsqu’elles prennent des médicaments de la famille des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Malgré ces avertissements, les données recueillies par le Système national des données de santé (SNDS) montrent qu’entre 2018 et 2023, plus de 700 000 femmes enceintes ont été potentiellement exposées à ces médicaments, avec au moins 26 000 d’entre elles ayant consommé des AINS après le cinquième mois de grossesse. Ce chiffre souligne la prévalence de cette pratique et le besoin urgent de renforcer la sensibilisation.

Les AINS sont une classe de médicaments couramment utilisés pour soulager diverses douleurs et réduire la fièvre. Leur mode d’action repose sur le blocage de la production de prostaglandines, des substances chimiques qui jouent un rôle clé dans le processus inflammatoire. Selon le médicament spécifique, ils peuvent être prescrits pour traiter la fièvre, les maux de tête, les douleurs liées aux règles ou d’autres types de douleurs diverses. Les plus connus de cette famille incluent l’aspirine et l’ibuprofène, mais il existe également d’autres molécules telles que le kétoprofène. Il est également utile de distinguer ces anti-inflammatoires non stéroïdiens des anti-inflammatoires stéroïdiens (AIS), qui dérivent de la cortisone et ont des mécanismes d’action différents.

Face à ces enjeux, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a décidé d’intervenir en renforçant l’information destinée aux femmes enceintes. Le 25 avril dernier, elle a indiqué avoir demandé aux fabricants de médicaments de revoir à la hausse la clarté et la précision du résumé des caractéristiques du produit (RCP) ainsi que la notice d’utilisation. L’objectif est de mettre particulièrement en exergue les contre-indications à respecter à partir du sixième mois de grossesse.

Pourquoi l’utilisation des AINS est-elle déconseillée après le sixième mois de grossesse ?

Les principales raisons pour lesquelles la consommation d’AINS est fortement déconseillée après le début du sixième mois concernent les risques potentiels pour la mère comme pour le bébé à naître. Ces risques incluent, entre autres, la possibilité d’un décès in utero, et la survenue de malformations congénitales, notamment au niveau du cœur ou de la paroi abdominale. D’autres troubles plus spécifiques sont également à signaler.

Les AINS peuvent perturber la bonne santé des reins du foetus, en provoquant une diminution du volume de liquide amniotique, ce qui peut entraîner, à terme, une insuffisance rénale chez le nouveau-né, surtout si leur utilisation se prolonge en fin de grossesse. Par ailleurs, ils ont la capacité de provoquer la fermeture prématurée du canal artériel, un vaisseau essentiel à la circulation sanguine du fœtus. La fermeture prématurée de cette voie peut conduire à une hypertension pulmonaire, mettant en danger la vie du bébé. Enfin, ces médicaments peuvent compliquer le déroulement de l’accouchement en prolongeant le travail et en augmentant le risque de saignements.

Il est important de souligner que, même si les risques sont plus marqués après le sixième mois, l’ANSM avertit aussi que la prudence s’impose avant cette période. « Avant le sixth mois, l’utilisation d’un AINS doit impérativement être encadrée par un médecin, qui pourra prescrire ces médicaments uniquement si le bénéfice attendu dépasse le risque encouru, et sous un suivi médical strict », précise l’autorité sanitaire. Les risques évoqués, tels que la fausse couche ou certaines malformations, bien que plus rares en début de grossesse, restent possibles.

L’ANSM rappelle également aux professionnels de santé et aux pharmaciens qu’aucune prescription ou délivrance banale n’est acceptable avant le sixième mois. Elle recommande en priorité le recours au paracétamol, considéré comme une alternative plus sûre pour soulager la douleur ou la fièvre durant la grossesse. La vigilance étant de mise, toute prescription doit faire l’objet d’un examen attentif du terme de la grossesse et d’une évaluation du rapport bénéfice-risque.

En résumé, ces recommandations visent à mieux protéger la santé des femmes enceintes et de leur futur enfant, en limitant autant que possible l’exposition aux AINS durant cette période critique. La communication claire et précise sur les contre-indications figure ainsi au cœur des mesures entreprises par les autorités sanitaires pour renforcer la prévention et la prudence lors de la prise de ces médicaments.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.