K-Way fête ses 60 ans : comment ce coupe-vent emblématique s’est renouvelé

Sophie Lambert

Le jubilé de la marque emblématique : 60 ans d’histoire et de succès

À l’occasion de ses six décennies d’existence, la société K-Way revendique fièrement la vente de 45 millions d’exemplaires de son célèbre coupe-vent à travers le globe depuis sa création. Aujourd’hui sous la propriété du groupe italien BasicNet, cette enseigne maintient la fierté de ses origines françaises. Elle exploite habilement son héritage national pour se faire une place parmi les grandes marques de mode. Selon Pascal Monfort, expert en histoire de la mode et auteur du livre intitulé K-Way 60 ans, il apparaît évident que ce vêtement a su évoluer en un indispensable de la mode contemporaine. Il possède deux qualités très appréciées : sa capacité à accueillir toutes les couleurs et divers dessins, et son aptitude à habiller un large spectre de personnes, qu’il s’agisse d’enfants, d’adultes, de sportifs, de citadins, de professionnels ou de coureurs.

Une rétrospective à travers une exposition parisienne

Du 23 au 26 octobre, la capitale française accueillait une exposition dédiée à cette marque. Intitulée In your life, cette manifestation racontait le parcours singulier de ce coupe-vent qui, à un moment donné, a failli disparaître. Ce vêtement, créé par Léon-Claude Duhamel dans le Nord de la France, à Roubaix, a failli rejoindre les vestiaires de l’oubli moins de 30 ans après sa naissance. L’histoire commence dans les années 1960, lorsque Duhamel, alors jeune homme, passe devant le Café de la Paix à Paris et voit une mère lutter pour protéger ses enfants de la pluie avec un simple grammage. Son inspiration lui vient alors de l’utilisation du nylon, matériau employé dans l’atelier de son père, qui fabriquait notamment des combinaisons de travail. L’idée de concevoir un vêtement pratique pour le grand public naît de cette vision, et le succès est immédiat. La renommée de K-Way (dont le nom évoque la formule « En cas de… ») s’étend rapidement, jusqu’à atteindre les pistes de ski. La marque devient même partenaire officiel des Jeux olympiques d’hiver organisés à Albertville en 1992.

Une histoire riche illustrée par des images d’archives

Les décennies 1970 et 1980 témoignent du rayonnement de K-Way, notamment lorsque l’on voit la marque habiller des skieurs lors de compétitions hivernales. En 1992, sa place aux Jeux d’Albertville confirme son statut de partenaire officiel. Sur une photographie d’archives, on voit la marque équipant des sportifs de l’hiver, renforçant son image de vêtement pratique et sportif.

Une crise majeure en 1995 : la fin d’une production emblématique

L’année 1995 marque également un tournant décisif avec la destruction de la seule usine mondiale de K-Way, située à Harnes, à proximité de Roubaix. La perte de cette unité de fabrication a laissé un vide de plus de 20 ans : pendant cette période, il était difficile de se procurer un coupe-vent de la marque. La plupart des modèles disponibles provenaient des vêtements usagés ou de pièces rares dénichées en friperie. Pourtant, la notoriété de K-Way ne s’effaçait pas, et la marque restait présente dans l’esprit des consommateurs. En témoignent les mots de Laëtizia Guetta, responsable de la communication de K-Way France : « La marque a su garder sa place dans le cœur des gens, et son nom a même intégré le dictionnaire en 1995. »

Une relance stratégique orchestrée par l’Italie

Ce n’est qu’en 2004 que le groupe italien BasicNet a décidé de racheter la marque. La relance de K-Way s’appuie sur une nouvelle production, désormais réalisée en Asie, où l’on fabrique aussi les vêtements de la marque sportive Kappa. La marque change alors de dimension, passant du marché populaire à celui du luxe accessible dans les boutiques haut de gamme. En 2013, le premier magasin dédié à K-Way ouvrait ses portes dans la capitale française. Depuis, le réseau a connu une expansion importante, avec aujourd’hui 65 boutiques réparties entre Saint-Malo, Chamonix, Strasbourg, Bordeaux et d’autres villes françaises. Son prix moyen a également évolué : dans les années 1980, un K-Way coûtait environ 45 euros (soit environ 142 francs de l’époque), alors qu’aujourd’hui, il est généralement vendu à un minimum de 150 euros. La directrice de communication, Laëtizia Guetta, précise que cette pièce est conçue pour durer toute une vie. Elle insiste aussi sur sa polyvalence, qui permet de s’habiller, de se protéger de la pluie, de le plier dans un sac ou de le transformer en accessoire ludique pour les enfants.

Une pièce phare dans le sillage de la culture et de la mode

L’engouement pour ce coupe-vent ne se limite pas à ses qualités pratiques ou son évolution commerciale. Son impact culturel est notable, notamment grâce à sa présence dans la culture populaire. La popularité de K-Way a notamment été propulsée par Sophie Marceau dans le film La Boum (1980), où elle porter ce vêtement lors de sa fuite à moto. Cette scène a contribué à révéler le compromis entre style décontracté et utilité pratique représenté par cette marque. Pascal Monfort souligne que malgré l’image immédiate que cette scène évoque, chacun possède aussi sa propre anecdote ou souvenir associé à un K-Way.

Un héritage qui dépasse la simple conception de vêtements

Aujourd’hui, la réputation de K-Way dépasse largement son aspect pratique ou sa place dans l’histoire du sportswear. Selon l’historien de la mode, il s’agit désormais d’un élément essentiel du vestiaire contemporain, qui a été adopté et réinterprété par de grands couturiers. La marque a notamment su s’imposer lors de défilés prestigieux, comme ceux de Jean-Charles de Castelbajac ou de la maison Fendi en 2024. Son passage à la Fashion Week de Milan en janvier dernier a confirmé sa place dans le monde de la haute couture, mêlant le style urbain à la mode de luxe.

Une longévité maintenue par une tradition d’innovation

L’histoire du K-Way témoigne de sa capacité à se réinventer tout en conservant son identité originelle. Son héritage, à la fois industriel et culturel, reste consolidé par une capacité à se renouveler sans perdre de vue l’essence qui a fait son succès. Cette marque, emblème d’un savoir-faire français, continue à séduire les nouvelles générations grâce à une stratégie qui mêle tradition et innovation.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.