Iran : Téhéran revendique à nouveau son droit à l’enrichissement d’uranium après le conflit avec Israël

Sophie Lambert

Moins d’un mois après le début du conflit entre Israël et l’Iran, qui est désormais terminé, Téhéran a annoncé ce samedi son intention de revenir sur la question de son programme nucléaire. Le gouvernement iranien a indiqué qu’il était prêt à coopérer avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) selon « une nouvelle approche », tout en réaffirmant que l’enrichissement d’uranium restait un droit inaliénable pour l’Iran. Cette déclaration intervient dans un contexte marqué par des tensions accrues à la suite des frappes israélo-américaines sur les installations nucléaires iraniennes en juin dernier, lors du conflit. Israël a déclaré avoir effectué ces attaques pour empêcher que l’Iran ne parvienne à se doter de l’arme nucléaire. En réponse, Téhéran a toujours nié vouloir acquérir une bombe atomique.

L’Iran considère que l’AIEA porte une part de responsabilité dans ces frappes et, en conséquence, a décidé de suspendre officiellement, début juillet, toute coopération avec le spécialiste du contrôle nucléaire. Cette suspension fait suite à une loi adoptée par le Parlement iranien. Selon le ministère des Affaires étrangères, « toute coopération avec l’Agence sera désormais gérée par le Conseil suprême de sécurité nationale ». Malgré cette décision, le gouvernement iranien a précisé qu’il reste ouvert à un dialogue diplomatique pour instaurer une confiance mutuelle, à condition que ses partenaires internationaux lui montrent qu’ils privilégient réellement la voie diplomatique, plutôt que d’utiliser la situation à d’autres fins. Abbas Araghchi, le chef de la diplomatie iranienne, a souligné que pour le moment, l’Iran attend des garanties de la part de ses homologues pour pouvoir engager des négociations constructives.

Une potentialité de relance du dialogue diplomatique ?

Après l’éclatement du conflit entre Israël et l’Iran, les discussions entamées depuis avril dernier entre Téhéran et Washington concernant le contrôle du programme nucléaire iranien ont été momentanément interrompues. Ces négociations visaient à établir un cadre permettant d’enrayer la progression du programme nucléaire iranien en échange d’une levée partielle ou totale des sanctions économiques imposées à l’Iran. Cependant, en ce samedi, le gouvernement iranien a indiqué qu’il étudiait actuellement les détails d’un éventuel redémarrage de ces pourparlers.

Depuis juin, les États-Unis ont lancé plusieurs attaques contre des sites nucléaires iraniens. Le 22 juin, l’armée américaine a bombardé le site souterrain de Fordo, situé au sud de Téhéran, ainsi que des infrastructures à Ispahan et Natanz. La nature précise des dégâts causés par ces opérations reste peu claire. Par ailleurs, durant cette période de conflit, Israël a multiplié ses frappes aériennes sur plusieurs sites nucléaires et militaires en Iran, menant plusieurs centaines d’opérations visant notamment des installations sensibles. En réponse, l’Iran a utilisé des missiles et des drones pour attaquer Israël à son tour. Sur le plan juridique, l’Iran affirme respecter le Traité de non-prolifération nucléaire, qu’il a rejoint en 1970, mais continue à défendre son droit légitime à enrichir de l’uranium à des fins civiles.

Il demeure que la divergence entre Washington et Téhéran sur cette question est profonde. Pour les États-Unis, l’enrichissement à des niveaux élevés constitue une « ligne rouge » qu’aucun compromis ne doit franchir. L’Iran, de son côté, considère l’enrichissement comme un droit « non négociable » pour assurer le développement d’un programme nucléaire civil. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’Iran est le seul pays non doté de la bombe nucléaire à enrichir de l’uranium à un taux élevé, dépassant largement la limite de 3,67 % fixée par l’accord international conclu en 2015 (conventionnellement appelé JCPOA). Ce seuil, en vigueur en 2018 lorsque les grandes puissances ont commencé à se retirer unilatéralement de l’accord, limite l’enrichissement à 3,67 %, mais l’Iran aujourd’hui a enrichment jusqu’à 60 %, bien au-delà de cette limite. La fabrication d’une arme nucléaire nécessiterait d’enrichir l’uranium jusqu’à un pourcentage d’environ 90 %.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.