Et si la majorité des Français buvait du mauvais café sans saveur ?

Sophie Lambert

L’Importance du café dans le quotidien français : traditions et enjeux

Considéré comme la deuxième boisson la plus consommée sur la planète après l’eau, le café occupe une place centrale dans la vie quotidienne des Français. Selon les données du Collectif Café, principale organisation professionnelle représentant l’ensemble des acteurs liés à cette industrie, près de 80 % de la population française consommerait régulièrement deux à trois cafés par jour. Ce chiffre témoigne de la pérennité et de la popularité de cette boisson, qui s’inscrit depuis longtemps dans les habitudes de vie et la culture nationale.

Cependant, ces dernières années ont été marquées par une diversification et une mutation du marché du café. L’avènement des produits dits de commodité, tels que le café moulu sous vide ou proposé en dosettes, a bouleversé la manière dont le café est acheté et consommé. La facilité d’utilisation et la rapidité d’obtention ont séduit une grande partie des consommateurs, mais cette évolution a également entraîné une certaine désorganisation du secteur. Effectivement, une majorité écrasante d’acheteurs français acquiert leur café en grande surface, souvent des produits de qualité inférieure, qui manquent de fraîcheur. L’appellation « 100 % Arabica », très courante, ne garantit pas toujours une haute qualité, car certains cafés commercialisés sous cette étiquette proviennent de cultures intensives peu traçables et peu respectueuses des terroirs. Le président du groupement professionnel Loïc Marion déplore ces pratiques, soulignant que la recherche de la facilité a parfois conduit à des produits de consommation de moindre qualité, mettant à mal la réputation du vrai café de qualité.

Le consensus autour du café de spécialité

Face à cette situation, une question se pose : qu’est-ce qui définit un véritable bon café ? La réponse à cette interrogation est forcément subjective, puisque la notion de « bon » café dépend largement des préférences gustatives de chacun. Pour Mikaël Portannier, champion du monde en torréfaction et Meilleur Ouvrier de France 2023, la notion majeure réside dans l’appréciation du goût. En effet, chaque personne possède un palais différent, et les saveurs ou arômes que l’un pourra aimer peuvent ne pas plaire à un autre. Certains cafés, issus de capsules ou de machines telles que Senseo, Nespresso ou Tassimo, peuvent convenir à certains consommateurs, mais il existe selon lui des options offrant un meilleur rapport qualité-prix.

Un type de café commence toutefois à faire consensus auprès des amateurs éclairés : le café de spécialité. Ce dernier se distingue par ses hautes qualités intrinsèques. Il s’agit d’un café traçable, cultivé dans le respect des terroirs et dans une optique de développement durable. Afin d’assurer un standard élevé, des labels comme Bio ont été créés, en imposant des critères stricts à leur production. La Specialty Coffee Association, organisation spécialisée dans l’évaluation de la qualité du café, attribue à ces produits une note dépassant souvent 80 sur 100. Lorsqu’un café atteint une note supérieure à 85/100, il est généralement considéré comme exceptionnel, et dès qu’il dépasse le seuil de 90/100, il est perçu comme un produit exceptionnel, hors du commun, réservé à une clientèle exigeante.

Les enjeux énergétiques et éthiques autour du café

Le prix d’un café de qualité est souvent supérieur à celui des cafés industriels, se situant autour de 20 euros par kilogramme en gros, contre 14 euros pour les produits plus classiques. Néanmoins, cet investissement offre davantage de garanties quant à la qualité du produit. Christophe Servell, vice-président du Collectif Café et fondateur de Terres de Café, insiste sur le fait qu’il n’est pas nécessaire de consommer une dizaine de cafés par jour, car le café n’est pas une nécessité vitale. Selon lui, considérer cette boisson comme une nécessité revient à oublier les enjeux éthiques et qualitatifs liés à sa production. Il recommande par conséquent de privilégier la consommation de café de haute qualité, pour respecter la filière et soutenir un savoir-faire artisanal.

Pour tirer parti de tout le potentiel aromatique du café, il est aussi crucial de respecter quelques règles de base. La consommation de café frais est essentielle, puisqu’un bon café doit être récolté dans l’année, torréfié peu après la récolte et moulue juste avant dégustation. La fraîcheur garantit au produit ses arômes et ses saveurs authentiques. En outre, la qualité de l’eau utilisée joue un rôle déterminant. Étant composé à 98 % par cette dernière, le café ne peut donner ses qualités que si l’eau est adaptée. Mikaël Portannier recommande une eau du robinet filtrée ou une marque comme Volvic, en respectant un ratio de 60 grammes de café pour un litre d’eau. Ces précautions permettent d’obtenir un café à la fois savoureux et respectueux de l’environnement.

Après tout, la quête du bon café repose sur la combinaison de plusieurs facteurs : une production responsable, une torréfaction maîtrisée, une consommation adaptée et un respect des valeurs qui soutiennent toute la filière. Il devient évident que pour savourer pleinement cette boisson emblématique, il ne suffit pas simplement de boire beaucoup, mais de faire le choix d’un produit de qualité, respectueux des hommes et de la planète.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.