Connaissez-vous la chrononutrition : manger certains aliments à heure précise ?

Sophie Lambert

Comprendre la chrononutrition : un équilibre entre rythme biologique et alimentation

Selon les précisions apportées par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES), la pratique de la chrononutrition désigne un domaine d’étude situé à l’intersection de deux sciences fondamentales : la nutrition d’une part, et la chronobiologie d’autre part, cette dernière étant la discipline consacrée à l’analyse des rythmes biologiques que l’organisme suit au fil des heures et des cycles. Cette approche vise à ajuster la consommation alimentaire en fonction des moments de la journée, dans l’objectif d’optimiser le métabolisme et de limiter ses perturbations. Romain Cardellini, chercheur ayant soutenu une thèse de pharmacie sur ce sujet à l’Université de Lorraine, explique que l’un des principaux buts de la chrononutrition consiste à maîtriser l’apport alimentaire de façon à réduire l’impact négatif que cette consommation pourrait avoir sur le fonctionnement énergétique du corps humain.

Une synchronisation hormonale et génétique pour une alimentation adaptée

La particularité de la chrononutrition réside dans sa capacité à moduler la composition et la répartition des repas en fonction des moments où ils sont pris, en tenant compte des variations physiologiques quotidiennes. Cela permet de limiter l’effet sur certaines fonctions du corps qui fluctuent en permanence, notamment celles liées au stockage des graisses ou à la dépense énergétique. La chrononutrition s’intéresse ainsi aux hormones sécrétées à des heures précises, comme l’insuline ou la leptine, ainsi qu’au rythme d’expression de certains gènes qui peuvent influencer la digestion ou la façon dont le corps métabolise les aliments. En adaptant ses prises alimentaires à la rythmicité biologique, il devient possible d’agir sur la physiologie pour optimiser la gestion du poids et la santé en général.

Les recommandations concrètes issues de la chrononutrition

Plusieurs conseils découlent de ces principes, et peuvent être appliqués au quotidien pour suivre cette approche. Tout d’abord, un petit déjeuner conséquent semble favorable, puisqu’un rapport de l’ANSES indique qu’une proportion plus importante de l’apport calorique journalier prise lors du premier repas de la journée est associée à un poids corporel plus stable ou à une moindre augmentation pondérale chez l’adulte. La pratique du petit déjeuner complet participe également à la réduction des facteurs de risque associés aux maladies cardiovasculaires. En revanche, il est conseillé de privilégier un dîner léger, en évitant d’en consommer trop tardivement, notamment au moins deux heures avant de se coucher. Selon les études disponibles, une consommation calorique massive en soirée pourrait favoriser l‘augmentation du risque d’obésité, et il est donc préconisé d’adopter un repas plus léger le soir, afin d’harmoniser l’alimentation avec le rythme biologique.

Une approche qui présente des limites et des précautions

Il est important de souligner qu’en 2010, l’ANSES avait classé la chrononutrition parmi les régimes hyperlipidiques, c’est-à-dire riches en lipides. Ces derniers se trouvent en majorité dans certains poissons, œufs, fromages, charcuteries, viandes, mais aussi dans certains végétaux, tels que les graines, les fruits oléagineux ou encore les huiles. Une telle composition alimentaire peut entraîner une consommation excessive de sel, dépassant la limite conseillée de 5 grammes par jour, comme le recommande l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). La même année, l’agence a mis en garde contre le fait que l’innocuité de ces régimes, notamment lorsqu’ils sont concentrés sur des macros-nutriments en particulier, n’était pas encore totalement établie, notamment en ce qui concerne leur impact sur la santé cardiovasculaire. En effet, un apport élevé en acides gras saturés pourrait favoriser l’apparition d’une insulino-résistance, même en cas de perte de poids. En conséquence, l’agence insiste sur le fait qu’aucune pratique diététique, aussi sophistiquée soit-elle, ne doit remplacer une alimentation équilibrée et diversifiée. Il reste essentiel de veiller à ne pas dépasser ses besoins énergétiques quotidiens tout en favorisant une variété d’aliments pour garantir la santé à long terme.

Au final, la chrononutrition propose une démarche intéressante, visant à aligner ses habitudes alimentaires avec le fonctionnement biologique naturel de l’organisme, mais elle doit être encadrée et complétée par une approche globale axée sur la diversité et la modération pour préserver sa sécurité et son efficacité.

Sophie Lambert

Sophie Lambert

Née à Colmar et passionnée par les enjeux sociaux et environnementaux, j’ai choisi le journalisme pour donner la parole à celles et ceux qu’on n’entend pas. Je crois en une presse locale libre, engagée et accessible à toutes et tous.