Le rôle de thanadoula est encore peu reconnu en France, mais il s’agit pourtant d’une pratique qui existe depuis longtemps dans les pays anglo-saxons. Son apparition récente en France, en 2021, a été influencée par la crise sanitaire de la Covid-19. Pendant cette période, pour la première fois, beaucoup de personnes n’ont pas pu rendre hommage à leurs proches décédés ou accompagner leurs fins de vie comme ils auraient voulu. Bien que cette profession ne soit pas encore officiellement reconnue par l’État, elle se conçoit comme une véritable pratique professionnelle. Elle est en réalité la renaissance d’un métier ancien qui a toujours existé dans certains contextes : dans les familles, dans les communautés rurales, il y a toujours eu quelqu’un pour soutenir les gens lors de leur naissance ou de leur passage vers l’au-delà. Aujourd’hui, alors que la façon dont les soins sont administrés évolue, il manque une connexion essentielle entre la personne mourante, ses proches et le personnel soignant. Le rôle de la thanadoula devient alors crucial pour combler cette lacune, en apportant une présence humaine et une médiation relationnelle dans ces moments délicats.
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Quelle formation pour devenir doula de fin de vie ?
Toute ma vie, j’ai été confronté à la question du deuil et à la fin de vie, que ce soit dans ma sphère personnelle ou professionnelle. Ces expériences m’ont permis de réaliser combien il est essentiel d’offrir un soutien aux personnes en fin de vie, dans leur souffrance autant que dans leur solitude. Il y a plus de deux décennies, j’ai rencontré Rosette Poletti, une spécialiste renommée en Suisse dans l’accompagnement de fin de vie. Elle m’a encouragé à transmettre ses méthodes en France, ce qui m’a conduit à créer l’Institut pour l’Accompagnement, le Ressources Deuil et Fin de vie. Cet institut propose une formation de neuf mois à destination de particuliers ou de professionnels qui souhaitent devenir doula pour les personnes en fin de vie. Pour intégrer cette formation, il est nécessaire d’avoir déjà vécu un deuil personnel, ou d’avoir accompagné quelqu’un en phase de transition vers la mort. Les candidats idéaux doivent faire preuve d’empathie, de tolérance, d’ouverture d’esprit ainsi qu’une grande capacité d’écoute. Ces qualités sont essentielles pour pouvoir accompagner de façon authentique et respectueuse les personnes confrontées à la fin de leur vie.
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Les questions que se posent souvent ceux qui savent qu’ils vont mourir
Lorsqu’un individu sent que la fin approche, il se pose souvent des questions fondamentales : comment va-t-il mourir ? Qui sera présent lors de ses derniers instants ? Comment se préparer à cette étape ultime ? La personne en fin de vie a besoin de quelqu’un pour l’écouter, pour lui offrir un espace d’expression. Elle doit également faire le deuil de ceux qu’elle aime, ce qui peut être une étape difficile à franchir. Même si l’on se sent préparé psychologiquement, il arrive parfois une grande angoisse au moment du départ, car l’incertitude sur ce qui va suivre demeure. On peut être croyant ou non, mais le fait de parler de la mort revient souvent à évoquer la vie elle-même. En réalité, il ne s’agit pas uniquement de parler de la fin, mais plutôt de faire face à la peur que cette fin induit. La mort reste souvent un sujet tabou ou difficile à aborder, pourtant elle est intrinsèquement liée à la compréhension de notre existence et à la manière dont nous la vivre.
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Comment aider à ouvrir le dialogue autour de la mort ?
Les familles et les proches qui accompagnent une personne en fin de vie attendent souvent un soutien dans cette étape difficile. Ils ressentent le besoin de pouvoir parler, de partager leurs émotions, mais craignent parfois de ne pas savoir comment faire ou laissent la peur de l’inaction prendre le dessus. Mon rôle en tant que praticienne est de créer un espace de parole où chacun peut s’exprimer librement, sans jugement. Faciliter cet échange permet aux proches de vivre plus sereinement l’ultime départ, en leur donnant la possibilité d’accompagner la personne en toute authenticité. Cela leur permet également de se sentir moins isolés ou démunis face à cette situation. La parole est libératrice, et dans ces moments-là, elle facilite l’acceptation et l’apaisement des émotions, aussi difficiles soient-elles.
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Est-il encore possible de continuer à faire des projets lorsqu’on sait qu’on va mourir ?
Tant que la vie est là, il reste toujours une possibilité de se fixer des objectifs, d’avoir des rêves ou des aspirations. Même si ces projets peuvent ne pas tous se réaliser, leur simple existence permet d’habiter pleinement l’instant présent. Viktor Frankl, psychiatre autrichien et survivant des camps de concentration, observait que ceux qui conservaient des projets, quels qu’ils soient, parvenaient généralement à une meilleure stabilité psychologique et à une plus grande résistance face à la souffrance. Selon lui, l’important est de continuer à entretenir l’espoir et la perspective d’un futur, même minime, pour donner un sens à notre existence et favoriser une fin de vie plus paisible. Selon cette idée, il est toujours pertinent de garder à l’esprit qu’avoir des projets, même modestes, peut aider à mieux supporter la perspective de la fin, en donnant un sentiment d’accomplissement et d’humanité jusqu’au dernier souffle.






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Comment accompagner la fin de vie avec l’aide des thanadoulas, pour la famille